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Du poil à gratter – Voie sans issue…

Nul doute que le TGV, une brillante réussite technologique, a fait de notre pays un précurseur dans le domaine des trains à grande vitesse. Ce mode de transport allie performance, économie, et écologie. Ne laissant pratiquement pas d’empreinte carbone, il ne consomme que 83 watts par personne et par kilomètre. Le problème est que, quelque soit le moyen de transport, la vitesse se paye.

Certains esprits chagrins ne manqueront pas de faire remarquer que cette électricité qui alimente le TGV est aux 3/4 d’origine nucléaire. Ce à quoi l’on pourrait répondre que la SNCF représentant 1,4% de la consommation française d’électricité, il n’est pas sur que l’on pourra fournir les 7200 Kilowatts que consomme un TGV durant un trajet Paris-Lyon avec trois panneaux solaires et deux éoliennes.

La vitesse se paye

Mais la vitesse de transport se paye. Elle se paye même d’autant plus chère que, passé un certain seuil, le coût augmente bien plus vite que les performances. Par exemple, le Thalys est 2 à 3 fois plus cher que ne l’était son ancêtre l’Étoile du Nord, pour une vitesse qui n’augmente que de 25% seulement.

Le Paris-Lyon à 16M€

Si un kilomètre de voie ordinaire flirte avec le million d’euros, le prix atteint 4,8 millions pour la ligne à grande vitesse Paris-Lyon, grimpe à 16 millions du kilomètre pour le tronçon Le Mans-Rennes, et culmine à 26 millions d’euros pour la ligne Sud Europe Atlantique. A cela, il faut ajouter le prix des rames, trois fois supérieur à celui d’un TER.

Un outil idéal de désenclavement

Le TGV aurait pu être l’instrument idéal pour relier les grandes métropoles de province entre elles et à la capitale, mais son exploitation actuelle est malheureusement bien éloignée de cet objectif.

Gares “paumées” et fréquentation trop basse

C’est ainsi que sous la pression des élus locaux et de la DATAR (Délégation à l’Aménagement du Territoire et à l’Action Régionale), la première gare TGV de la ligne Paris-Lyon ne fut pas Dijon, pourtant capitale régionale, mais, celle de Montchanin, située en pleine campagne à 8 kilomètres du Creusot. La conséquence ne se fit pas attendre, les voyageurs ne furent que 250.000 en 1982 au lieu des 900.000 attendus…

Patience à longueur de temps

Le TGV était l’instrument idéal du désenclavement. Mais, si la ligne Lyon-Paris fut inaugurée en 1981, il faudra que les bretons attendent 2017 pour voir enfin Brest à 3 heures de Paris alors que la déclaration d’utilité publique de la ligne date de 2007 ! Quand aux habitants de Clermont-Ferrand qui espèrent dans le projet d’une ligne Paris-Clermont-Ferrand-Lyon destinée à désengorger l’actuelle ligne Sud-Est, ils devront au mieux patienter jusqu’à 2025.

Des TGV- TER

Le problème actuel trouve sa source dans les divergences qui existent entre les intérêts locaux et nationaux. Les collectivités locales payent, et elles payent même fort cher, pour participer à la création de lignes à grande vitesse. Il semble donc normal qu’elles exigent que les trains ne se contentent pas de traverser leurs régions sans s’y arrêter. Le résultat : une utilisation du TGV qui ressemble parfois plus à celle d’un TER avec de graves conséquences financières.

4€ par voyageur pour … plus de TGV

Une gare TGV, cela fait toujours bien dans le paysage tout en flattant l’orgueil des élus, mais cela peut coûter très cher. C’est ainsi que le Conseil Général du Département de la Vienne a financé la gare du Futuroscope à hauteur de 9 millions d’euros. La fréquentation n’étant pas à la hauteur des espérances, il en coûte toujours plus de quatre euros par voyageur pour une gare qui ne verra plus passer de TGV dès 2017, lorsque ces derniers auront quitté leur trajet actuel pour la ligne Sud Europe Atlantique.

100 à 200M€ de perte

Dans le cas de la future ligne de TGV Tours-Bordeaux, les responsables du projet ont promis aux élus de nombreux arrêts dans leurs communes,  afin attirer les financements des collectivités locales. Cela obligera les TGV à faire escale dans des petites gares de centre ville comme à Angoulême ou Châtellerault, et donc d’emprunter des lignes traditionnelles, où il ne peuvent pas rouler à leur vitesse maximale. Résultat, avant même d’avoir été construite la ligne annonce déjà une prévision de 100 à 200 millions d’euros de pertes annuelles !

Couteux et inefficace

En détournant le TGV de sa vocation initiale, qui aurait du être celle d’une liaison moyenne et longue distance entre les pôles régionaux, les collectivité locales en font un outil excessivement coûteux et inefficace.

40% de leur temps à vitesse réduite

Selon le rapport de la Cour des Comptes, les TGV desservent 230 destinations et passent 40% de leur temps en moyenne sur les lignes classiques donc à vitesse réduite. C’est ainsi qu’entre Quimper et Rennes, les TGV effectuent plus d’arrêts intermédiaires et mettent plus de temps que des TER. En comparaison, le train à grande vitesse japonais ne dessert que 17 gares tout en transportant 50% de voyageurs de plus.

Le réseau secondaire ne passe qu’après

Malheureusement, force est de constater que le développement du TGV n’a pu se faire qu’au détriment du réseau secondaire. Point n’est besoin d’habiter l’Ardèche pour s’en rendre compte. Le simple fait de prendre un RER aux heures de pointe démontre de la déshérence du réseau et l’accident de Brétigny, qui ne doit rien au hasard, n’a fait que révéler la gravité des carences.

Perdu la notion de service

En sacrifiant sa mission de service public au profit du seul TGV et en pratiquant une politique d’abandon des réseaux régionaux jugés trop peu rentables, la SNCF n’est plus capable de se montrer à la hauteur de sa mission. Ses objectifs ne devraient pas être dictés par la seule rentabilité, mais par la nécessité d’assurer à chacun de nos concitoyens, la possibilité de se déplacer en bénéficiant de transports ferroviaires fiables, adaptés à leur besoins, et à un coût raisonnable.

Demain, entassés dans des trains low-cost ?

C’est en tout cas l’état d’esprit qui a présidé à la nationalisation de 1937. Reste à savoir si, avec l’inévitable ouverture à la concurrence imposée par Bruxelles, on ne finira pas par voyager entassés dans des trains low-cost tractés par une locomotive à vapeur conduite par un travailleur détaché…

 Brigitte Goldberg

 

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