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Fukushima : “Un accident nucléaire, ça ne se répare pas !”

Janick Magne, professeure à Tokyo depuis 35 ans, a vécu la catastrophe nucléaire de Fukushima. Elle est allée 3 fois en zone interdite et elle alerte les populations et les gouvernements. « C’est l’horreur absolue ! On n’en sort pas indemne ! ». Elle témoignait hier soir à Golbey.

« Au moment du tremblement de terre, j’étais à Tokyo, raconte-t-elle. Tokyo se trouve à 230km de Fukushima, mais ça tremblait tout le temps nuit et jour. On a compris qu’il se passait quelque chose de très grave. On dormait tout habillé pour pouvoir sortir à n’importe quel moment ».

Un pic de radioactivité atteint Tokyo le 15 mars, l’eau est contaminée et il est interdit d’en boire. «  J’avais une peur irraisonnée que les secousses ne fassent « péter » la centrale de Hamaoko qui n’était pas très loin. Vous vivez avec la peur aux tripes. Ça bouleverse complètement votre vie. On pense à la fin du monde. Les gens de Fukushima ont tout perdu, leurs biens, leur maison, leur travail. Du jour au lendemain, ils n’avaient plus rien du tout. C’est la triple peine ! »

Pire qu’un accident industriel !

Pendant plus de 6 mois, elle ne peut plus écouter de musique, elle ne rit plus. Elle est engluée dans l’après choc. Elle, qui n’était pas plus militante que ça, décide de se secouer, de transformer cette souffrance en combat positif. Elle témoigne et alerte, écrit des articles, raconte. « Je fais ce que je peux pour que ça se sache, explique-t-elle. Nous sommes peut-être 7500 français au Japon à avoir vécu ça en direct et très peu à avoir pénétré dans la zone interdite. J’ai un ami ingénieur persuadé que la science sait tout et peut tout. Mais c’est faux ! Contre une catastrophe nucléaire, on ne peut rien faire ! Il n’y a plus de place pour l’homme, sa famille, ses champs, ses animaux. C’est pire qu’un accident industriel. Il faut en parler !».

C’est ce qu’elle fait à Golbey, invitée par Vosges Alternatives au Nucléaire, Amis Bio, Vosges Nature Environnement.

Du jour au lendemain, vous n’avez plus rien du tout !

Les responsables d’Areva et Tepco, ne sont pas restés sur place après l’accident.

Dans la zone interdite, les populations ont été évacuées. Ces familles n’ont plus rien. Tous leurs biens sont contaminés et ils ne retrouveront jamais leur maison.  « Je n’aurais jamais cru devenir si pauvre un jour », commentent  plusieurs d’entre eux. Ils étaient tellement confiants dans la garantie apportée par la science et relayée par le gouvernement et les entreprises concernées.

« Ce qui est terrible, c’est que les gens ne savent pas qu’ils ne retrouveront rien. Ils croient qu’il suffit d’attendre un peu, alors que la décontamination prendra des centaines d’années. J’essaie de dire à ma collègue qu’il faut qu’elle refasse sa vie ailleurs », poursuit Janick Magne.

Les enfants ne peuvent plus jouer dehors

Le seuil normal de radioactivité est de 0,9 milli sieverts (mSv)/ an. Près du réacteur, il dépasse les 1700 mSv. Il est impossible de l’approcher, mais dans les zones autorisées, la radiation varie de 1 à 15 mSv dans les rues des villes situées à 30 km. Beaucoup de familles ont quitté les lieux parce qu’ils ne veulent pas vivre avec cette épée de Damoclès. Mais partir, c’est quitter son travail pour ceux qui en ont encore un, et comment vivre sans aucune ressource ?

« Les enfants ne peuvent plus jouer dehors. Ils ne sortent que 3h par jour et avec des manches. Des associations essaient d’organiser des sorties « éducatives ». C’est le cas de NPO « enfants en excursion » qui emmènent de temps en temps, les enfants jouer dans la neige à l’ouest de Fukushima »,  décrit la conférencière. Mais ces associations n’ont pas de moyens, juste leur bonne volonté.

Le césium cause des problèmes cardiaques, les gens ne le savent pas

Janick Magne ne quitte plus son compteur Geiger. Elle a pu aller 3 fois en zone interdite. Le gouvernement délivre des autorisations spéciales pour les habitants qui ont été évacués. Ils doivent enfiler des combinaisons, gants, chaussons et coiffe, qu’ils rendent à la sortie de la zone pour qu’ils soient brulés. Ils ne peuvent pas y rester plus de 5h. « Dans cette zone, les taux de radioactivité montent parfois à certains endroits jusque 33 ou 35 mVs. Pourtant, le gouvernement Japonais prétend que le danger est passé. Il incite les habitants à revenir sur une partie de la zone moins exposée ».

Comme les particules radioactives ne sont pas visibles, les gens préfèrent les ignorer. « J’ai vu des jeunes se promener sans protection sur la plage de Futuba, qui est en zone interdite », témoigne encore Janick Magne. Ils ignorent que le Césium se fixe sur les muscles et les os et provoque des problèmes cardiaques, avant les cancers, les problèmes de thyroïdes ou les mutations génétiques. « A Tchernobyl, les cimetières regorgent de tombes de jeunes de 13 à 15 ans, morts adolescents de problèmes cardiaques », rappelle-t-elle.

Organiser un vrai suivi médical avec l’OMS

Janick Magne dénonce le non suivi médical. « Au lieu de prendre au sérieux l’exposition des habitants, le gouvernement cherche à minimiser les risques. Il y a déjà eu 7 cas d’enfants rencontrant des problèmes de thyroïde ou de cancers et 50% des enfants ont des nodules de la thyroïde. Mais il y a une omerta organisée ».

Elle voudrait que l’OMS aide les familles qui n’en ont pas les moyens, à aller vivre dans une zone moins dangereuse. « Dans les villes proches du réacteur endommagé, les doses de radioactivité sont faibles, mais cumulées sur l’année, elles sont encore trop fortes !».

Mettre en place une aide sanitaire

Pour elle, il  est urgent que l’OMS organise l’aide sanitaire, vérifie que le suivi médical soit bien assuré, mette en place des cures de pectines et que des mesures de prévention soient établies, pour surveiller les défaillances cardiaques, l’émergence de cancers et les mutations génétiques.

Il faudrait également organiser des séjours pour les enfants dans des familles européennes, pour  leur permettre de vivre quelques semaines dans une atmosphère saine et de faire reculer le taux de césium inhalé.

Enfin, il faudrait accompagner les associations et ONG qui offrent aux enfants, l’opportunité de jouer en les emmenant hors des zones contaminées.

Pro-nucléaires, devenez liquidateurs

Il y a 54 réacteurs au Japon, 2 seulement fonctionnent actuellement, mais le gouvernement voudrait relancer le nucléaire. «  Il est question de faire supprimer l’article 9, qui dit que le Japon n’entrera pas en guerre. Le gouvernement actuel veut une armée, la bombe pour faire face aux Coréens, aux Chinois et aux Russes ».

Et  aux personnes qui défendent le nucléaire, elle suggère avec humour de s’engager à être liquidateurs pour la prochaine catastrophe ! Il en a fallu 800 000 à Tchernobyl et Fukushima peine à trouver des ouvriers pour intervenir…

Janick Magne poursuit ses conférences en France début avril à Condes, Saint-Etienne, Chambery et Bonnet, près de Bure avant de rejoindre le Japon.

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